Conte d’Amour et de Paix – Du Gaspillage
Pendant la journée, Pênin et ses frères avaient discuté chaudement sur les questions de nourriture.
La nuit, au cours d’un songe, une vielle femme toute de blanc vêtue vint l’entretenir sur le sujet de ses préoccupations. La vielle femme lui dit dans un murmure:
Pour que « un » vive, il faut que « un » meurt. Je veux parler de l chaîne alimentaire.
Puis elle poursuivit:
« Il est des coutumes qui enseignent une profonde sagesse. Mais l’utilisation banale de celles-ci leur enlève toute leur saveur originelle. Parmi celles-là, il est une coutume musulmane qui recommande de consommer tout ce que nous prenons dans notre assiette. Ainsi, d’après cette coutume, il faut laisser dans son assiette, ni grains de riz, ni morceau de pain. Les assiettes doivent donc être obligatoirement vidée de leur contenu au cours du repas. il ne fau pas verser de nourriture par terre non plus. Nous ne devons prendre dans nos assiettes que ce que nous sommes capables de finir, de consommer.
Pour faire ces beaux plats de riz, il a fallu dévaster des rizières; il en est de même de nos plats d’ignames, de bananes, qui ont nécessité la destruction de quantité d’ignames et de bananes ! Et que dire des belles sauces dont nous raffolons ! Pour elles aussi, il a fallu que des aubergines, des oignons, des tomates, du sel, et que dis-je ! des bœufs, des poulets, des lapins … meurent. Ils sont tous morts pour nos servir. Rendons-leur hommage e les utilisant à bon escient. »
Les commentaires suivants sont courants:
« Le jour du jugement Dernier, tout ce que nous avons versé, tout ce que nous avons gaspillé, se dressera sur notre chemin et constituera des obstacles entre nous et le Juge Suprême, et nous risquons ainsi d’arriver en retard … Ce qui équivaut directement à une place en Enfer. »
Qu’y aurait-il d’immérité dans cette image ?
Nous le mériterions bien si nous étions coupables de pareil gâchis, de pareil besogne digne de la pire inconscience, de la pire des bassesses. Si nous ne voulons pas les consommer, si nous ne pouvons pas les consommer, laissons-les vivre. Ils sont nos frères, elles sont nos sœurs dans la chaîne de la vie. Alors, s’ils se sacrifient pour nous, de grâce, ne les gaspillons pas.
Extrait de : Contes d’Amour et de Paix sous l’Arbre à Palabres de Ouattara Bêh